Chapitre 6

Tu as toujours aimé les furets. Et c'est plutôt cool d'en être un. Tu ne vois pas très bien, mais ton ouïe est excellente. Et tu te sens si... heureux. Joueur comme un chaton, mais amical, comme un chien.

Tu sautes sur un pouf, gambades sur le dos d'un canapé. Être un furet, c'est amusant !

Ce n'était pas difficile d'obtenir la morphose. Tu as attendu que Mme Humphries aille à côté pour se plaindre. Elle a laissé la porte arrière ouverte, et c'était facile de se glisser à l'intérieur et de cueillir l'une des créatures lisses et poilues. Elle s'est joyeusement blottie contre ta poitrine pendant que tu acquérais son ADN.

Tu rapetisses rapidement, ton corps devenant élégant et souple. Tu as maintenant de la fourrure, des moustaches et de petites griffes. Dès que tu te transformes, tu as envie de jouer avec les trois autres furets. Ils sont confus de te voir, mais ils viennent te renifler, puis te poursuivent dans la pièce.

La porte arrière claque. Mme Humphries rentre, un furet drapé sur sa poitrine. Elle regarde le gâteau glacé dans sa main et hausse les épaules. Elle le jette dans la poubelle de la cuisine.

"Calories vides," marmonne-t-elle. "Pas nécessaire."

Est-ce que c'est quelque chose qu'un Contrôleur dirait ? Ou bien la Dame aux Furets est-elle encore plus bizarre que tu ne le pensais ? Tout le monde aime le gâteau glacé !

Tu te recroquevilles sous le canapé pour qu'elle ne remarque pas qu'il y a un furet en plus. Mais elle ne fait de toute façon pas attention à ses animaux de compagnie. Un autre furet frôle ses jambes. Elle ne le ramasse pas, ne lui parle pas doucement, ne le caresse pas.

Bizarre ? Ou procédure standard ?

Le téléphone sonne. Mme Humphries le décroche.

"Oui."

Un silence. "Oui. J'y serai. Non, je ne vais pas attirer l'attention," dit-elle, l'air irrité. "Pas plus que d'habitude. Cet hôte est apparemment excentrique."

Cet hôte. C'est une Contrôleuse !

Tu te recules sous le canapé. Tu entends un grincement au-dessus de toi alors qu'elle s'assoit. Tu vois ses pieds dans des mocassins à semelles épaisses. Elle ne bouge pas.

Et ne bouge pas.

Quelle heure est-il ? Depuis combien de temps es-tu dans cette morphose ? Tu n'as que deux heures ! Tu observes une ombre se déplacer lentement sur le sol. Comment sortir de la maison sans qu'elle te remarque ?

L'ombre touche le bout de sa chaussure, et elle se lève.

"Il est temps," marmonne-t-elle. Elle fait le tour de la pièce, et tu te glisses en avant pour regarder. Elle enfile son manteau, prend un sac en toile à proximité. Elle se dirige vers la porte et l'ouvre. Tu peux te faufiler dehors ! Tu te précipites, mais elle se retourne soudain.

"Dame aux Furets," murmure-t-elle. "Voyage toujours avec un animal de compagnie."

Et avant que tu puisses bouger ou réagir, elle te ramasse d'une main. Elle te met dans le sac en toile ! Elle le ferme partiellement.

Tu peux sortir ton nez, mais c'est tout. Tu es piégé, et l'horloge tourne !

Mme Humphries jette le sac sur le siège avant de la voiture. Tu te cognes la tête contre la poignée de la porte. La voiture démarre brusquement. Tu essaies de manipuler la fermeture éclair avec tes pattes. Impossible.

Combien de temps te reste-t-il ? Tu peux à peine voir l'horloge de la voiture. Vingt minutes. Trop juste pour être à l'aise.

La voiture s'arrête. Mme Humphries te balance sur son épaule. Tu sors ton nez. Tu es sur le parking de la plage. Elle va à la réunion du Partage ! Au moins, les autres Animorphs seront là.

Mme Humphries pose le sac sur le sable. Elle s'éloigne pour parler à un groupe de personnes près du filet de volley-ball.

Dix minutes restantes. Tu remues ton nez par l'ouverture, secouant la tête pour élargir l'écart. La fermeture éclair cède un peu. Pas beaucoup. Pas assez.

Tu entends la voix de Cassie à proximité. Puis tu te souviens que tu peux utiliser la télépathie !

<CASSIE ! CASSIE ! C'EST MOI ! JE SUIS EN MORPHOSE FURET !>

« Quoi ? » entends-tu Cassie dire.

« Je n’ai rien dit », répond quelqu’un. Tu réalises que Cassie ne peut pas te répondre par télépathie. Et elle ne peut pas parler à voix haute, sinon cela paraîtrait suspect.

<Cassie, je suis dans un sac en toile allongé sur le sable. Je ne peux pas sortir ! Mon temps de morphose est écoulé. Je pense être près du filet de volleyball. Au secours !>

Tu entends le crissement du sable. Tu vois des orteils bruns nus. Le visage inquiet de Cassie apparaît soudain dans ton champ de vision.

« C’est toi ? » murmure-t-elle.

<C'est moi ! Vite !> Cassie ouvre le sac et te glisse négligemment sous son bras. Elle marche tranquillement vers les dunes.

« Presque là », murmure-t-elle.

Elle grimpe par-dessus les dunes et te dépose. Elle regarde autour d'elle. « D'accord. Vite ! » Tu n’as pas besoin qu’elle te le dise. Tu te concentres, et tu sens tes jambes s’allonger. La fourrure sur ta peau devient inégale. Tes oreilles deviennent plus rondes. Ta queue rétrécit.

Cassie fronce le nez. « Ewww. C’est la pire morphose que j’aie vue jusqu’à présent. »

« Désolé de te décevoir », dis-tu, content de sentir que tu as une bouche. « Je n’ai pas eu beaucoup de pratique. »

Rachel apparaît au-dessus de la dune. « Dépêchez-vous, les gars », dit-elle à voix basse. « Jake va se transformer en son chien, Homer. »

« Chiens et chats et furets », dis-tu, te sentant soudain désespéré. « Quel tas de morphoses ridicules. Comment allons-nous combattre Visser Trois avec ça ? »

Quelque chose de féroce brille dans les yeux de Rachel. Tu aperçois quelque chose que tu n’as jamais vu auparavant chez la jolie et populaire Rachel. La fille est une guerrière.

« Tu as raison », dit Rachel.