Chapitre 25

"Jake ? Ça va, chéri ?" me demanda ma mère ce soir-là au dîner.

Je levai les yeux. Je réalisai que j'avais fixé mon assiette. Quelque chose avec des pâtes et du thon.

"Quoi ?" demandai-je.

Ma mère et mon père échangèrent un de leurs regards de "parents inquiets". "Eh bien, tu ne manges pas. Tu n'aimes pas ça ?"

Je haussai les épaules. "Désolé. C'est bon. J'étais juste... distrait."

Mon père acquiesça. "C'est juste un changement par rapport aux deux dernières soirées. Tu mangeais comme si tu voulais finir toute la maison."

"Je faisais ça ?"

Tom haussa un sourcil vers moi. "Quoi, maintenant tu vas prétendre que ça n'est pas arrivé ? Hier soir, tu étais là à manger six morceaux de poulet et tu n'arrêtais pas de dire à quel point c'était bon. Puis tu as mangé une tarte. Une tarte qui était censée être pour nous quatre."

Je cachai un sourire. Bien sûr. Ax. L'Andalite m'avait joué pendant trois jours - deux heures à la fois. Ax était dangereux avec la nourriture. Le sens du goût était encore totalement incroyable pour lui. Quand il était en morphose humaine, il ne fallait pas se mettre entre lui et une barre de chocolat. Ou une tarte, je suppose.

"Tu étais un vrai glouton," dit Tom. "Poulet. Maïs. Pommes de terre. Ou, comme tu n'arrêtais pas de dire, 'Pommes de terre. Toes. Tay-toes.' J'ai cru que tu devenais fou."

Et étais-tu méfiant, Yeerk ? pensai-je en regardant mon frère. Un nouveau Yeerk était dans la tête de Tom. Un autre maître arrogant de la galaxie.

Mon frère était piégé dans un petit coin de son propre esprit, capable de voir et de ressentir, mais impuissant à faire quoi que ce soit. Je savais.

Je n'ai pas beaucoup dormi cette nuit-là. Je ne voulais pas que les rêves viennent. Je craignais de terribles cauchemars de l'œil. L'œil qui m'avait fixé depuis un autre univers.

Mais le seul rêve qui est venu était un rêve familier.

J'étais le tigre. Mon frère était la proie. Mais, à la fin, j'étais mon frère. Et il était moi.

Aux informations ce soir-là, il y avait un petit reportage sur la fermeture du nouvel hôpital. Il n'y avait aucune explication. Mais je savais ce qui s'était passé. Les Yeerks savaient que leur plan était découvert. Ils comprenaient que nous étions au courant.

Nous leur avions fait assez mal.

Mais je savais qu'il ne fallait pas célébrer. Visser Three serait plus déterminé que jamais à nous arrêter.

Le lendemain, j'ai fait quelque chose de stupide. Du moins, Marco n'arrêtait pas de me dire que c'était stupide. Mais il n'a pas beaucoup objecté. Il comprenait.

Nous nous sommes tous retrouvés à la grange de Cassie. Et j'ai utilisé le téléphone portable de son père pour appeler Tom à la maison. Je me suis partiellement transformé en loup avant de le faire. Juste assez pour faire les plus petits changements.

Assez pour changer la forme de ma bouche, de ma langue et de ma gorge. Pour que ma voix sonne très différente.

Il a décroché au troisième appel. "Ouais ?"

"J'ai un message," dis-je d'une voix épaisse et tordue qui ne ressemblait pas du tout à la mienne.

"Quoi ?" demanda Tom.

"N'abandonne pas, Tom. N'abandonne jamais."

J'ai raccroché avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit.

"Tu penses que Tom... le vrai Tom... a entendu ?" demanda Rachel.

"Il a entendu," répondis-je.

Je me demandais s'il aurait la force de tenir bon.

Mais je connaissais la réponse. Vous voyez, une partie de mon frère était maintenant dans mon propre esprit. Avec les échos d'un Hork-Bajir mort depuis longtemps et d'un simple Gedd. Et oui, même un peu d'un Yeerk avec des rêves de gloire.

Marco sourit de son sourire sarcastique. "Et c'est vrai ? Allons-nous gagner ?"

"C'est une planète très compliquée, Marco. C'est ce que j'entends, en tout cas. Et c'est un univers très étrange. Tout pourrait arriver."