Chapitre 21

<Aaaahhhhh !>

Le camion ne roulait plus sur plusieurs roues alignées des deux côtés. Il était dangereusement penché vers la gauche, ne roulant que sur les roues d'un côté.

<Aaaaahhhhh !>

Taureaux et bouvillons, nous étions tous poussés d'un côté, entassés les uns contre les autres. Le plancher de la benne du camion s'élevait à un angle absurde.

Nous allions chavirer !

Et pourtant... le camion continuait à avancer. Sur les roues d'un côté, presque sur le flanc, il continuait à avancer !

Et lentement... lentement... si... lentement... l'angle diminuait. Nous basculions de nouveau vers la droite. Puis...

WHAM !

Le camion se remit sur toutes ses roues.

THUMP THUMP THUMP THUMP.

Les bouvillons, Tobias et moi tombâmes tous sur la droite. Le camion penchait maintenant à droite, mais pas autant.

WHAM !

Le camion se stabilisa de nouveau, et nous filions sur la route vers l'usine de conditionnement de viande.

<Bond,> dit Marco. <James Bond.>

Scrrrrreeeeeee !

Marco appuya sur les freins et le camion s'immobilisa en glissant et en dérapant devant la grille de l'usine de conditionnement de viande.

Maintenant que le chargement avait été redistribué, j'avais une meilleure vue, plus dégagée, sur le côté gauche du camion. Je pouvais voir deux gardes armés s'approcher de la cabine. Ils semblaient quelque peu perturbés. Peut-être impressionnés. Peut-être admiratifs. Peut-être effrayés.

Il est parfois difficile de décrypter les expressions faciales humaines.

"Vous êtes dingue ?" cria un des gardes.

"Mauvais amortisseurs, mec," dit Marco d'une voix grave, gutturale et boueuse.

J'étais surpris de l'entendre faire des sons de bouche. Il devait s'être partiellement remorphosé en humain. Juste assez humain pour passer.

"Mauvais amortisseurs ! Vous êtes cinglé ? Vous devriez être enfermé ! Vous devriez être dans une cellule capitonnée !"

"Tenez, signez juste le manifeste," dit le Prince Jake, essayant d'abaisser sa propre voix.

"Vous êtes autorisés," dit le deuxième garde. "Faites-nous juste savoir quand vous partirez, pour qu'on s'éloigne de votre chemin."

<Oh chouette, ils nous laissent entrer,> dit Tobias sombrement.

Marco reprit son morphing de gorille dès que les gardes s'éloignèrent. <Je pense voir une rampe là-bas. Ça doit être là où on va,> dit-il. Puis, en réponse évidente au Prince Jake, <Bien sûr, je peux reculer jusqu'à la rampe. Pourquoi je ne pourrais pas reculer ?>

<Oh, mec, ça va être moche,> dit Rachel, parlant depuis la narine de Tobias.

Le camion fit un bond en avant, s'arrêta. Fit un bond en avant à nouveau. S'arrêta. Grincement ! Recula brusquement. S'arrêta. Grincement ! Secousse. Arrêt. En avant. Secousse. En arrière. Arrêt. Grincement ! Secousse. En avant. Arrêt.

<J'ai entendu parler d'un demi-tour en trois temps,> dit Cassie. <Je suppose que ce serait un demi-tour en trente temps.>

Secousse. En arrière.

BOUM !

Tous les taureaux reculèrent sous l'impact. <D'accord, on y est,> annonça Marco.

<Ces vaches vont attendre avec impatience une mort douce et facile après ce trajet,> dit Rachel.

<Tobias ? Éternue et envoie Rachel à quelques centaines de mètres.>

Je vis un homme corpulent sauter de la plateforme et courir vers l'avant du camion. Il criait. "Où as-tu appris à conduire, espèce d'idiot ? Je vais te… hé ! Où est le conducteur ?"

<Nous avons pris la morphose de mouches,> nous informa le Prince Jake. <Nous revenons.>

<Je ne peux pas distinguer une vache gigantesque de la planète d'une autre,> dit Marco.

<Tobias et Ax ? Secouez un peu la tête. Nous voulons la bonne narine.>

Dans un bruit étonnamment fort, la porte arrière du camion s'ouvrit. L'homme corpulent et un homme très mince étaient en train de discuter.

"Je n'ai jamais vu une conduite pareille ! Pas étonnant que le conducteur se soit enfui. Il devait être ivre. Il doit être fou !"

"Hé ! Ce sont des taureaux !"

"Eh bien, je serai… transporté comme ça ? C'est vraiment insensé !"

L'homme mince plissa les yeux avec suspicion. "Bandits andalites ?"

L'homme corpulent rit. "Je pense qu'un Andalite saurait comment conduire un camion. De plus, même un Andalite n'est pas assez stupide pour morphoser en un bœuf ou même un taureau et entrer dans un abattoir. Ils devraient être idiots."

<Je n'aurais pas pu mieux le dire moi-même,> murmura Marco.

De l'immeuble, des odeurs horribles atteignirent mes narines : sang. Fumier. Sang. Pourriture biologique. Et encore du sang.

Et encore du sang.