Chapitre 21

Je pouvais sentir mes genoux trembler alors que je m'agenouillais au bord du quai. Je pris une profonde inspiration et baissai la tête dans la boue.

La première chose que je fis fut de libérer Illim. Puis je glissai jusqu'au conduit auditif de M. Tidwell, rompant mes connexions avec son cerveau. Je compressai mon corps en me tortillant à travers le petit tunnel.

Puis j'étais libre. Dehors, dans la piscine Yeerk.

J'étais aveugle, presque sourd et muet. Mais voici la partie étrange. Je m'en fichais. J'étais avec mes frères et sœurs, baignant dans les rayons de Kandrona dont mon corps avait besoin. Si j'avais eu une bouche, j'aurais poussé un long ahhh de satisfaction. J'étais chez moi.

J'étais chez moi ?

Je me suis donné une claque mentale sur les deux joues. J'avais laissé mes instincts de Yeerk prendre le dessus pendant une minute. Ce n'était définitivement pas chez moi.

Et j'avais une mission à accomplir. Je devais trouver Aftran. Rapidement.

J'ai utilisé mon sonar pour examiner la zone autour de moi. Il y avait des Yeerks partout. Au-dessus de moi. En dessous de moi. De chaque côté.

Je me suis rappelé qu'à leurs yeux, je n'étais qu'un Yeerk de plus. Rien de remarquable. J'étais complètement en sécurité.

Une tête de Hork-Bajir fut plongée dans l'eau. J'ai suivi la vague qu'elle a créée pour pénétrer plus profondément dans la piscine. J'ai fait un autre balayage sonar. Des Yeerks, des Yeerks et encore des Yeerks.

Une vaguelette m'a fait tourner à moitié. Mon sonar a détecté les deux piliers en acier. Sous le plus éloigné, il y avait une chaîne avec une boîte à l'extrémité. La boîte était juste de la taille pour contenir un Yeerk.

Aftran. Elle était là-dedans. Je le savais.

Mais comment allais-je la rejoindre ? Je n'avais pas de jambes pour donner des coups de pied. Pas de bras pour pagayer.

J'ai remué mon corps aussi fort que possible et avancé d'environ un quart de pouce. Aftran n'était qu'à environ six pieds. Mais à ce rythme, il me faudrait toute la nuit pour l'atteindre.

Et je n'avais certainement pas toute la nuit.

Utilise le Yeerk, me suis-je dit. Il sait comment nager. J'ai relâché mon contrôle sur les instincts Yeerk.

Contraction-poussée. Contraction-poussée. Contraction-poussée.

J'ai contracté mon corps, puis l'ai propulsé vers l'avant. Je nageais !

Enfin, en quelque sorte. Je n'étais pas exactement prêt pour l'équipe olympique, mais je me déplaçais plus vite qu'avant.

Contraction-poussée. Contraction-poussée. Contraction-poussée.

J'ai finalement atteint la cage. Je l'ai étudiée avec mon sonar. C'était une boîte, en métal je supposais, avec de très petits trous partout. Les trous étaient bien trop petits pour qu'un Yeerk puisse s'y faufiler.

Mais le loquet semblait assez basique. Il ne serait pas trop difficile à ouvrir. Si j'avais des mains.

Je pourrais dé-morpher vers mon propre corps. Mais j'étais juste sous le pilier. Deux Hork-Bajir se tenaient sur le bord. Et d'autres allaient et venaient, escortant les hôtes. Il y avait de bonnes chances que l'un d'eux me remarque.

PA-loosh !

Une tête d'hôte fut plongée dans l'eau, Mon sonar a capté le mouvement sauvage alors que l'hôte - un homme plus âgé cette fois - essayait de se tordre pour échapper au Yeerk qui se dirigeait vers son oreille.

Le Yeerk s'est introduit dans l'hôte, et quelques instants plus tard, l'homme a cessé de se débattre et a calmement relevé la tête.

Les hôtes qui se faisaient réinfester augmentaient mes chances de me faire attraper. Un Yeerk pouvait se glisser dans son hôte, me voir dans ma morphologie humaine, relever la tête et me dénoncer.

Je ne pouvais pas prendre le risque de me transformer si près du quai. Je devais trouver un autre moyen de sortir Aftran.

PA-loosh.

Une autre tête d'hôte a été poussée dans la piscine. Une fille. Mon sonar a capté ses longs cheveux flottant dans l'eau. C'était difficile à dire, mais je ne pensais pas qu'elle était beaucoup plus âgée que moi.

<Je suis prêt à interroger le prisonnier.>

Cette voix. C'était la voix du mal. Elle m'a transpercé, envoyant des pics de terreur à travers mon corps petit et mou.

Visser Trois ! Il était de retour !

Et je n'avais même pas trouvé un moyen d'ouvrir la cage d'Aftran !

<Apportez-moi Aftran Neuf Quatre Deux,> commanda Visser Trois.

La cage d'Aftran a immédiatement commencé à bouger à travers la piscine. Quelqu'un tirait sur la chaîne. Emmenant Aftran loin de moi.

Et je n'avais pas de mains pour l'arrêter.

Mais je devais faire quelque chose. Maintenant !

<Tout le monde est invité au quai d'infestation,> dit Visser Trois, d'un ton jovial. <Vous êtes invités à assister au sort des traîtres !>