Chapitre 24

"NOOOON !" hurla Tennant, recroquevillé comme un rat pris au piège. Je n'éprouvais aucune pitié pour lui. Je ne connaissais pas la pitié. J'étais le nounours.

<Marco, reprends-toi !> cria Cassie. <Tu vas le tuer.>

<Pourquoi pas?> dis-je. <C'est un Yirk. C'est un phoque-Yirk.>

Tout était noir et blanc dans cette morphose. Simple. Tuer la proie. Tuer l'ennemi. Rien d'autre ne comptait.

Et pourtant, une petite partie de mon esprit disait, <Phoque-Yirk ? Nounours ? Hein ?> Tennant se recroquevilla en une petite boule dans le coin. Il criait, "Aidez-moi ! Aidez-moi !"

Mais l'équipage ne semblait pas très intéressé par le fait de l'aider. La plupart s'enfuyaient.

<Tu es perdu dans la morphose, Marco,> dit calmement Cassie. <Reprends-toi. Tu as eu une autre morphose mixte. Maintenant, reprends le contrôle. Reprends le contrôle.>

<Tout le monde, restez où vous êtes,> dit Jake.

<Ne vous inquiétez pas,> dit Rachel. <Je ne vais pas m'approcher de ce truc. Si j'étais en morphose grizzli, d'accord, mais...>

<Je suis prêt pour la diffusion, Prince Jake,> dit Ax calmement, comme si rien d'inhabituel ne se passait.

<Allez, Marco,> encouragea Cassie. <Ça va aller. Tu te souviens de la mission?>

La mission ?

Je poussai le corps recroquevillé de Tennant avec ma patte. Le regardai se ratatiner et frissonner.

<Qu'est-ce qui se passe, Marco?> dit Cassie apaisante. <Parle-moi. Nous sommes tes amis. Parle-nous, parle-moi et ->

<Parle à ma place,> coupa Jake. <Marco. Gère ça. Maintenant. C'est un ordre.>

C'était comme un seau d'eau glacée versé sur ma tête.

C'était comme se réveiller d'un rêve intense. Rapide. Douloureux. Lentement, mon esprit reprit le contrôle.

<Jake, il traverse des moments difficiles dans sa vie,> dit Cassie. <Il est stressé. Son père est ->

<Cassie, tu sais que je t'aime et que je t'admire, mais tais-toi,> dit Jake. <Écoute-moi, Marco. Nous n'avons pas le temps pour ta pitié envers toi-même. Je me moque de tes problèmes. Tu gères ça, tout de suite.>

Je commençai à rétrécir.

Mon corps se dégonfla comme un ballon avec un petit trou.

Ma tête, rétrécissant. Redevenant une tête de caniche normale.

<C'est pas vraiment un comportement éclairé, Jake,> rétorqua Cassie, visiblement en colère. <s'il est stressé ->

<Cassie, il n'est pas toi, il n'est pas Rachel, il n'est même pas moi. C'est Marco,> dit Jake. <Ce dont il a besoin, c'est de sortir sa tête de son derrière et de se souvenir de ce qu'il dit toujours.>

Ce que je dis toujours ? De quoi parlait-il ?

Jake dit, <La vie est soit une tragédie, soit une comédie. En général, c'est ton choix. Tu peux te plaindre ou tu peux rire.>

Je ris. Ris de reconnaissance. Oh, oui. Je dis ça.

J'étais complètement caniche.

"C'est quoi ce -" dit Tennant, se relevant précipitamment.

<Bon travail, Marco,> dit Cassie.

Ou était-ce ?

Je m'éloignai en courant de Tennant.

"Andalite," siffla Tennant. Il ne portait plus l'odeur de la peur. Il sentait la haine pure. "Vous avez fait une terrible erreur. Vous auriez dû me tuer quand vous en aviez l'occasion. Je ne vous montrerai pas une telle clémence."

<Prêt, Ax,> dit Jake.

Tennant se baissa et attrapa un cordon électrique qui traînait sur le sol. Il en arracha une extrémité du mur, l'autre de la lampe de scène à laquelle il était attaché.

CRAAACK !

Le fouet de fortune de Tennant pouvait me couper en deux.

<Oh, mec,> gémis-je.

<Retourne sur scène, Marco,> dit Jake. <On est prêts à rouler.>

<Laisse-les juste prendre la photo, Marco,> dit Rachel. <Ensuite, on te sortira de là.>

Je me recroquevillai derrière les restes de la chaise de Tennant.

CRAAACK !

Il m'a raté de peu.

"Ça va être tellement thérapeutique," ricana Tennant.

<Ne bouge pas, Marco,> dit Jake. <Attire-le dans le champ de la caméra.>

<La réunion est terminée,> appela Tobias. <Ils quittent le bureau !>

CRAAACK !

Le cordon claqua sur mon dos ! Comme être frappé avec un bâton brûlant !

"Aïe !" criai-je pathétiquement.

<Le personnel et les gens de la chaîne descendent le couloir,> dit Tobias. <Ils seront là dans dix secondes.>

<Accroche-toi, Marco,> dit Cassie.

<Est-ce que j'ai le choix?>

<Prêt, Ax?>

<OUI, Prince Jake.>

William Roger Tennant lâcha le fouet, se pencha et me saisit par le cou. Me souleva dans les airs. Se retourna pour faire face aux caméras. Enroula sa main autour de ma gorge et me tint devant son visage.

Il commença à serrer. Je gémissais et me débattais.

"Allez, Andalite," dit Tennant, ses yeux fous. "Tu ne vas pas mourir si facilement, n'est-ce pas?"

<Et... nous sommes en direct !> annonça Ax. <Voici Marco !>

Soudain, toute la scène fut baignée de lumière aveuglante.

Je suffoquais ! Ma tête semblait prête à exploser. Ma vision floue devenait de plus en plus trouble. Mon corps s'affaiblissait.

J'étais trop faible pour me débattre.

"Mourir, Andalite ! Mourir !" hurla Tennant, insensible aux lumières et au bourdonnement des caméras.

"Que diable se passe-t-il ici ?" cria quelqu'un. "Mon Dieu, Tennant ! Que fais-tu ?"

"Éloignez-vous de moi !" cria-t-il. "Je vais tous vous tuer !"

"Que font ces chiens ici ?"

"Des Andalites," siffla un membre de l'équipe.

"Crève, sale cabot, crève !" hurla Tennant.

"Qu'est-ce que tu racontes, on est à l'antenne ? Coupez la diffusion, pour l'amour du ciel ! Coupez la diffusion !"

"Je vais te faire sortir les tripes par les oreilles !"

"Il est fou !"

Une masse de corps m'entoura. Des mains se tendirent vers Tennant. Le maîtrisèrent. Dégagèrent ses doigts de ma gorge. Je tombai au sol.

<Cassie ! Rachel ! Ça suffit, sortez Marco de là !>

<On s'en occupe déjà, chef intrépide,> dit Rachel.

"Grrrrrrrr..."

Rachel et Cassie grondèrent. Grognèrent. Rampèrent vers la masse d'hommes et de femmes.

"Sainte - " cria quelqu'un. "Ce ne sont pas des chiens. Ce sont des loups, mec ! Ce sont des loups !"

"Que se passe-t-il ici ? Quel genre de production est-ce ?" tonna un homme.

Le gars d'UPN ?

"C'est de la folie. Vous voulez mettre ce cinglé à l'antenne ? Essayez Fox, je ne suis pas intéressé."

"Ce n'est pas... c'est... vous ne..." balbutia Tennant. "C'est juste un malentendu !"

J'étais à bout de souffle, oublié sur le sol. Je me demandais si ce serait un mauvais moment pour mentionner mon idée pour un nouveau Star Trek.

<Les gars et les filles,> dit Jake, <je crois que notre travail ici est terminé.>