Pourquoi la Russie est notre ennemi

Resume
Ce billet est la suite du billet : Comment être pacifique à l’ère de la guerre en Ukraine
Je vous conseille de le lire (ou de le relire) avant de passer à la suite.
Depuis la publication de ce premier texte, j’ai l’impression que les discours niant la menace russe pour la France se sont multipliés, aussi bien à l’extrême gauche qu’à l’extrême droite. J’ai donc voulu écrire ce billet pour expliquer pourquoi, selon moi, la gauche devrait considérer la Russie comme un ennemi.
Préambule
Ce billet est la suite du billet : Comment être pacifique à l’ère de la guerre en Ukraine
Je vous conseille de le lire (ou de le relire) avant de passer à la suite.
Introduction
Depuis la publication de ce texte, les discours relativisant ou niant la menace russe pour la France semblent s’être multipliés. Il est devenu courant d’entendre que la Russie ne serait pas notre ennemi, que le soutien à l’Ukraine serait une soumission à l’OTAN, voire que la Russie serait un rempart contre l’impérialisme américain.
Je pense au contraire que la Russie est bel et bien un ennemi, non pas en tant que pays ou peuple, mais en tant que régime politique.
On ne lutte pas contre la Russie
Le problème, ce n’est pas la Russie. Pour être franc, je me fiche complètement que la Russie envahisse la Pologne, les pays baltes ou même la France, dans le sens où je n’ai pas d’attachement particulier aux frontières, aux langues, aux drapeaux, ou à l’emplacement de la capitale.
Pour moi, les communes, les régions ou les nations ne sont que des administrations auxquelles je n'ai aucune attache émotionnelle. Si demain, on me dit que ma commune va fusionner avec Trifouillis-les-Oies, je ne vais pas crier à la disparition de mon identité. Je n'en aurais juste rien à foutre. J’y verrai juste un changement administratif sans impact sur ma vie. Il en va de même pour les nations.
Digression sur les langues
Quand on me dit : « Sans les Américains, on parlerait tous allemands », je trouve cet argument absurde. Le Troisième Reich n’avait ni l’intention ni les moyens d’imposer la langue allemande à toute l’Europe occupée.
Mais même si ça avait été le cas, moi, j’aurais trouvé ça très bien que la langue française disparaisse et qu’il n’y ait plus qu’une seule langue. Ce serait mille fois plus pratique si en Europe, on parlait tous la même langue. Et de toute façon, je pense que sur le long terme (on va dire mille ans), la disparition des différentes langues européennes est inévitable (si l’espèce humaine continue d’exister et d’avoir à disposition des moyens de déplacement et de communication performants).
Je ne comprends pas ceux qui se désolent de cette évolution. Pour moi, la diversité linguistique est juste une source de complexité inutile et de perte de temps (et d’argent). Pour moi, elle n'a aucun avantage.
Inversement, je ne comprends pas non plus ceux qui veulent interdire aux gens de parler leur langue maternelle. Qu’est-ce que ça peut faire si vos collègues parlent arabe entre eux ? Ou si certaines écoles enseignent le Breton ou le Basque ? Tant qu’ils ne font de mal à personne, où est le problème ? Même si je ne comprends pas le délire, tant qu’ils ne font de mal à personne, ils font bien ce qu’ils veulent. Et je ne vois pas en quoi ils menaceraient l’unité de la nation.
Et quand bien même, au risque de me répéter, l’unité de la nation, je m’en fous comme de l’an 40 (et peut-on vraiment parler d’unité si elle est maintenue par la force). S’ils veulent leur indépendance, je ne vois pas pourquoi on leur refuserait. Ça ne nous concerne pas. Les frontières administratives n’ont que peu d’importance. Ce qui compte, ce sont les rapports de force entre les différents groupes sociaux et leur envie de coopérer.
Mais cessons là notre digression et revenons au sujet.
On lutte contre le fascisme
La raison pour laquelle il fallait lutter contre le régime hitlérien n’était pas que les élites françaises étaient plus vertueuses ou plus alignées sur mes intérêts que les élites allemandes. D'ailleurs, contrairement au mythe propagé par Zemmour, les élites politiques et économiques françaises étaient pour beaucoup complices des nazis et ont collaboré activement, notamment dans la persécution des Juifs (voir : Robert Paxton, La France de Vichy 1940–1944 , Seuil, 1999 ).
Non, il fallait combattre le Troisième Reich, car il s’agissait d’un régime fasciste, raciste, réactionnaire et génocidaire. Si l’Allemagne avait été une démocratie libérale, j’aurais plaidé pour la fin rapide de la guerre, quel que soit le vainqueur. Et si elle avait été une vraie démocratie progressiste, j’aurais probablement soutenu l’invasion.
Ce que nous devons combattre, ce n’est pas un pays, mais un système politique : le fascisme.
La Russie est une menace fasciste
Et la Russie actuelle est un régime fasciste selon les critères historiques : culte du chef, répression des opposants, idéologie ultranationaliste, militarisme, mépris des droits humains (cf. La Russie entre autoritarisme et fascisme et Poutine : le nouveau visage du fascisme ). Et il veut explicitement démanteler les régimes parlementaires libéraux d’Europe pour les remplacer par des dictatures réactionnaires soumises à Moscou (voir la page Wikipédia consacré à la Relations entre l'extrême droite européenne et la Russie depuis les années 2010 ).
Pour les gauches européennes, le gouvernement russe est donc une menace qu’il faut combattre. Déjà de manière défensive en soutenant l’Ukraine de toutes nos forces afin d’y fixer les troupes russes le plus longtemps possible et d’affaiblir le plus possible son armée. Ensuite, en mutualisant les moyens militaires européens dans le but de créer une armée suffisamment puissante pour dissuader Moscou de nous envahir. Mais aussi offensivement, en soutenant les groupes antifascistes russes et en ayant nos propres "fermes à trolls" pour diffuser des idées progressistes sur les réseaux sociaux russes. Oui, c’est de l’ingérence, et non, je ne vois pas en quoi c’est mal.
La Russie de Poutine n’est pas la plus grande menace pour la France
Cependant, la Russie de Poutine n’est pas le groupe qui menace le plus de faire basculer la France dans le fascisme.
Les manipulations médiatiques qui ont permis l’élection de Macron en 2017 et la délégitimation progressive des institutions démocratiques ne sont pas le fruit de l’ingérence russe, mais de nos propres milliardaires, qui contrôlent une large partie des médias français et en orientent les lignes éditoriales (voir : DÉLINQUANTS ET ULTRA-RICHES, comment ils ont fait élire Macron ).
On parle beaucoup des opérations de désinformation et de promotion des idées d’extrême droite de la Russie en France et plus généralement en Occident. Mais leur influence est ridiculement faible comparée à celle du groupe Bolloré.
Même à son apogée, les audiences de Russia Today en France étaient minuscules comparées à celles de CNews ou C8. Et leur discours est bien plus extrémiste et mensonger que celui des trolls russes.
De même, aux USA, le premier propagateur de mensonges et d’idées d’extrême droite, c’est Fox News.
On parle beaucoup des fermes à trolls russes, mais X, Facebook ou YouTube étaient bourrés de désinformation et de contenu d'extrême droite bien avant qu'ils existent.
Les comptes les plus actifs et influents dans la promotion des idées d’extrême droite en Occident sont financés et mis en avant grâce aux actions de milliardaires et d’entreprises occidentales. Les Russes n’y sont pour rien si les algorithmes de YouTube, Facebook ou de X favorisent la mise en avant de contenus réactionnaires ou haineux. Ils n’y sont pour rien non plus si ces plateformes manquent cruellement de modération.
Sur ces enjeux, voire par exemple :
De Musk à Trump : comment l’oligarchie techno-césariste veut renverser la démocratie en Amérique
Elon Musk réitère son soutien à l’extrême droite allemande pour construire un monde à sa botte
Users Polarization on Facebook and Youtube
Telegramming Hate: Far-Right Themes
Et ils n'y sont pour rien si les conditions sont réunies dans les pays occidentaux pour qu'une large part de la population soit sensible à ses contenus.
Conclusion
Il ne faut pas nier la menace russe. Cependant, il ne faut pas oublier que la première menace pour nos valeurs démocratiques et le mode de vie des Français, ce sont Macron, Bolloré, Bernard Arnault, Dassault, Bettencourt, Marine Le Pen, et les électeurs qui les soutiennent.
Nous ne nous battons pas contre les Russes, mais contre les fascistes de tous les pays, aux côtés de nos frères et sœurs de tous les pays. En 1940, les Allemands eux-mêmes souffraient du régime hitlérien. Aujourd’hui, ce sont les Russes qui souffrent le plus du régime poutinien.
Toutes les personnes de bonne volonté doivent s’unir pour chasser les Macron, Trump, Le Pen, Poutine, Bolloré, Arnault, et tous les autres tyrans de notre époque.
Et nous ne devons pas dire : « ce qui se passe ailleurs ne nous regarde pas ». Il n’y a qu’une seule planète, et les fascistes n’accepteront jamais de la partager... sauf si nous les y contraignons.